Résumé
The Smile (Thom Yorke, Jonny Greenwood, Tom Skinner) dévoilent déjà 'Cutouts', un troisième album en deux ans, prenant la suite des brillants 'Wall of Eyes' (2024) et 'A Light For Attracting Attention' (2022). Enregistré entre Oxford et Londres en même temps que 'Wall of Eyes', l'opus de 10 titres produit par Sam Petts-Davies comprend des arrangements aux cordes du London Contemporary Orchestra.
Notre avis
C’est baigné dans une atmosphère onirique que l’on entre dans Cutouts, troisième opus de The Smile. Toujours prompts à l'expérimentation, maitrisant à la perfection le mélange de leurs influences, les membres de The Smile s'autorisent toutes les audaces. C’est peu dire que le talent du trio est de nouveau de sortie, et ce pour la deuxième fois cette année. Trois albums, trois grands disques, où s’arrêteront-ils ?
Foreign Spies, avec ses synthés vintage, ses boucles d’harmonies descendantes, n’est que la mise en bouche d’un album riche, complexe et merveilleux. Le deuxième titre est tout aussi planant mais dans un autre registre, plutôt folk et légèrement oriental, dans lequel les cordes et les flûtes enrobent le trio d’un souffle enchanté. Un délicieux orage.
Après ces deux morceaux envoutants, l’incroyable titre progressif Zero Sum, désarçonne et passionne à la fois. Une intro en cliquetis, une guitare et une basse urgentes, des percussions, on se croirait chez King Crimson. Quand apparaissent les saxophones on monte dans le rouge, puis ça reprend avant de terminer en apothéose ce titre court et incroyablement addictif sur l’absurdité du monde. On retrouvera avec plaisir le procédé sur Eyes & Mouth, avec sa guitare en solo permanent, sa basse qui entre après quelques instants, se fait discrète, puis porte jusqu’au bout cette chanson en forme de tube sur un tapis funky.
Avec Colours Fly, le trio invite la world music à se mêler à son rock. La clarinette apporte un parfum d’Orient et emmène le titre vers l’abstraction.
Quand arrive Don’t Get Me Started, on change de registre, un mystérieux synthétiseur se promène sur six temps et la voix de Thom York réverbérée façon Dub semble suspendue. L’arrivée de la batterie crée une subtile superposition de rythmes. Au milieu du morceaux, on se retrouve en apesanteur avant de retomber sur nos pieds.
Nous évoquerons encore Tipoe et ses accents de Philippe Sarde ou bien le beau combo infrabasses, percussions et voix de The Slip.
Des références affluent à l’écoute de Cutouts et entendre l’agencement si subtil de toutes celles-ci, formant une œuvre parfaitement aboutie au rendu simple malgré la complexité de sa construction confère au génie. Si, sur Cutouts, les musiciens font de nouveau preuve de virtuosité, c’est sans jamais tomber dans la démonstration ou la prétention, comme nous avons pu l’entendre chez certains de leurs illustres confrères du jazz rock et du rock progressif. Car The Smile est pourvu du sens de la mélodie autant que de l’émotion et sa technique sans faille est ici au service du Beau. Les compositions sont certes recherchées mais organiques, humaines.
Cutouts, dont les titres ont été enregistrés en même temps que ceux de Wall of Eyes n’est donc en rien un disque de second plan.